Mauvaise gestion de Facebook : le cas Nestlé

Aujourd’hui je me suis amusé à reprendre la chronologie du cas – célèbre en eRéputation – de Nestlé mêlée à l’ONG célèbre te redoutable, GreenPeace. On aurait pu appeler cet article « Comment gérer au plus mal les réseaux sociaux » tant l’entreprise a multiplié les bourdes… La suite dans ces lignes !

Un cas d’école en réseaux sociaux

ou comment accumuler les erreurs en 48 heures

Le cas Nestlé-GreenPeace est l’illustration parfaite d’une gestion désastreuse – car inexpérimentée – des réseaux sociaux. Je me suis amusé à revenir sur des évènements qui ont prêt d’un an maintenant, pour mettre à jour des erreurs qu’aujourd’hui plus personne ne commettrait. C’est – entre autres – pour ces raisons que la fonction de Community Manager se développe : les marques ont compris à quel point il était dans leur intérêt de suivre de prêt ces nouveaux médias qui peuvent – si aisément – se retrourner contre eux. Retour en arrière.

Faux logos Nestlé

Chronologie des évènements

Le 16 mars 2010, Greenpeace s’attaque à l’entreprise à travers un rapport sur la déforestation en Inde. L’ONG incrimine la multinationale suisse (la plus puissante dans le secteur de l’agro-alimentaire, avec un CA de plus de trois fois supérieur à celui du second, PepsiCo), l’accusant de tuer Orang-Outan et de perturber le climat.

Le 17 mars, Nestlé réagit à travers un communiqué officiel, indiquant que l’entreprise coupe les ponts avec son fournisseur Sinar Mas. Elle s’engage à n’utiliser que de l’huile de palme durable en 2015. Cette réaction rapide arrive trop tard : Greenpeace a déjà ouvert le feu… L’ONG a déjà lancé plusieurs mini-sites avec des vidéos parodiques, détournement de logos, envoi de tweet sur Twitter, déferlement sur Facebook, envoi d’e-mail au Président de Nestlé… Les militants vont jusqu’à se déguiser en orang-outan pour manifester devant les bureaux de Nestlé.

L’entreprise poste même une vidéo parodique sur Youtube, où la publicité de Kit-Kat (produit phare de Nestlé élaboré à partir d’huile de palme) sur le thème fameux « Have a break » est détournée : on y voit un cadre dévorer le doigt d’un Orang-Outan, prolongement d’une barre de Kit-Kat. La videéo n’est pas vue 1000 fois que Nestlé la fait retirer pour violation du copyright.

GreenPeace réagit… en republiant la vidéo sur Viméo (un éditeur de contenu plus « permissif), et en communiquant sur le fait que Nestlé a tenté de censurer les vidéos. De plus, les militants de GreenPeace investissent la page Facebook de Nestlé (comptant 90 000 fans), et postent des commentaires négatifs renvoyant sur la vidéo. L’entreprise ne censure pas, mais réagit en postant via sons statut face book un lien renvoyant vers ses déclarations de s’engager vers une politique de commerce équitable pour l’huile de palme. Le lien sera commenté trente fois, tandis que les images relayées par Greenpeace se propagent : de nombreux utilisateurs de Facebook utilisent les faux logos comme photo de profil, relayant la polémique auprès de leurs contacts.
Pour contrer le mouvement, l’entreprise relaye l’information de Twitter, mais elle n’était suivi à l’époque « que » par 1000 followers…

 

Le 18 mars, Nestlé est critiqué sur le fameux réseau social sur la manière dont sa page facebook est gérée. Elle réagit alors sèchement, en demandant – par statut interposé – aux internautes de ne pas utiliser de logo détourné. Le post sera commenté de nombreuses fois, et l’entreprise répondra sèchement à plusieurs reprises, laissant penser que le community manager a du perdre un certain contrôle de lui-même. Le problème est qu’il parle au nom d’une multinationale pesant quelques 60 milliards d’euros de chiffre d’affaire.

Facebook et Nestlé

Le 19 mars, Nestlé communiquera 8 fois par nouveau statut. Ceux-ci seront chacun commentés de 30 à 200 fois. L’entreprise commence par demander de ne plus utiliser les logos détournés, puis finit par s’excuser pour cette demande de suppression de faux-logos, pour la suppression des posts et le fait d’avoir été impoli.
Mais le mal est fait, et la, polémique fera rapidement le tour du net et des médias. GreenPeace l’alimente, renvoyant vers la page Facebook de Nestlé et habillant ses sites webs avec le logo détourné « Killer ». GreenPeace communique alors plus par Twitter que par d’autres moyens de marketing viral.
Devant l’affluence de personnes consultant sa page Fan de facebook, Nestlé finit par fermer celle-ci durant quelques jours…

 

Le 22 mars, Nestlé publie un nouveau statut sur sa page Facebook réouverte : « Social media: as you can see we’re learning as we go. Thanks for the comments. »
Pendant ce temps, en Inde, le syndicat des producteurs d’huile de palme réagit au fait que Nestlé se sépare de son fournisseur Sinar Mas en appelant au boycott de ses produits…

 

Une succession d’erreurs…

Ce cas indique à quel point la réputation d’une entreprise de rang mondial peut être écornée sur le net si celle-ci ne prend pas garde aux signaux faibles et ne réagit pas de manière approprié. Le phénomène de « bad buzz » peut rapidement s’attaquer à toute entreprise de rang conséquent, et si celle-ci n’agit pas de manière appropriée, sa réputation en fera les frais.

Il faut donc garder à l’esprit qu’un seul individu peut représenter une menace pour une entreprise, quelque soit l’importance de celle-ci. Ce cas en est emblématique : GreenPeace a su, à l’aide d’une vidéo et d’un montage grossier, répandre un message dévastateur pour la firme suisse.

Il est intéressant de noter que sur ce cas-ci, c’est l’enchaînement de mauvaises réactions de Nestlé qui a permis à GreenPeace de faire passer son message. Les diverses tentatives de la multinationale pour enrayer la polémique n’ont fait que développer la rumeur : de la censure de la vidéo jusqu’aux demandes de non-diffusion des logos, l’entreprise n’a pas été en mesure de saisir les enjeux du web communautaire. En effet, les règles s’appliquant sur le net ne sont pas les mêmes que celles s’appliquant dans le monde réel : la liberté de parole est bien plus développée sur le World Wide Web, et les menaces ne touchent pas les internautes (d’où, par ailleurs, le développement du piratage en ligne : l’internaute se sent intouchable derrière son écran, et se permet des mots qu’il n’oserait pas dans la vie réelle).

Et si l’information circule plus vite sur le net que partout ailleurs, elle peut aussi passer très facilement dans la vie réelle, étant relayée par toute forme de médias se saisissant de la polémique devenue actualité.

On remarque que, malgré une gestion désastreuse du web communautaire, l’entreprise a su avoir quelques bonnes réactions : en réagissant rapidement, en renvoyant systématiquement vers ses positions qu’elle n’a pas changées, en laissant ses détracteurs s’exprimer sur la page Fan de Facebook et en publiant son mea culpa.

Et vous, qu’en pensez-vous?